Ce mardi 19 octobre 2021, il était là, comme un invité prodigue, comme une fée penchée sur le berceau de la future Maison citoyenne du Gâtinais Montargois : le soleil ! Cette journée exploratoire, au cœur des possibles de ce territoire à entrées multiples, nous l’avons vécue dans une lumière dorée d’automne, des plus inspirantes. Prenez votre ombrelle, on vous raconte notre déambulation du port du Grignon, au bord du canal d’Orléans, à la Maison Feuillette, à Montargis.
Commençons par vous présenter nos hôtes : les Porte-Voix impliqués dans le projet ! Sur le perron de la Maison citoyenne donc, ce matin-là, nous attendent Michel Brosset, Jean-Christophe Cicéron, Hubert Gasnier, Mickey Leclercq, Mélina Migeon et Magali Sautreuil : un comité d’accueil grand format, à l’échelle du rayonnement de cette future maison, qui ambitionne d’irriguer, à terme, tout le Gâtinais-Montargois. Sur le tapis rouge des visiteurs qui s’avancent, on peut reconnaître Daniel Herskovits, le facilitateur embarqué dans l’exploration des Porte-Voix dans sa phase de prototypage, mais aussi Hélène Delpeyroux, de Villes au Carré, ou encore deux « exfiltrés » de la Mairie de Tours : Antoine Cavalier (chargé de mission démocratie participative) et Pauline Occelli (chargé de mission en urbanisme), venus puiser matière à penser à la campagne. Pour compléter ce générique, citons les preneurs d’images de la web TV Map36 (Dominique Fleurat et Mohini). Et pour finir, n’oublions pas les essentiels, ceux que les Porte-Voix avaient choisi de mettre en lumière pour leurs initiatives inspirantes et éclairantes d’une Maison citoyenne en devenir. Parmi ces « lanternes », Denis Godeau (de La Belle de Grignon), Timothée Huck (des Jardins de la Voie Romaine), Daniel Leroy (Maire de Vieilles-Maisons-sur-Joudry), William Simon (Gâtinais en Transition), Claude-Eve Spach (Maraîchère bio à la retraite à Presnoy) et Stéphanie Ventre (CNCP – Maison Feuillette).
C’est à Vieilles-Maisons-sur-Joudry, à 5km à l’est de Lorris (là où la Maison citoyenne du Gâtinais prend sa source) que nous avons rendez-vous ce matin du 19 octobre 2021, sur le port de Grignon, au bord du Canal d’Orléans. Après une mise en contexte salutaire et tonifiante du Porte-Voix Hubert Gasnier, Denis Godeau nous raconte l’aventure de la Belle de Grignon. Ce chantier naval participatif ambitionne de faire revivre l’ancienne cité batelière du canal d’Orléans, par la reconstruction d’une péniche traditionnelle en chêne, dite « flûte berrichonne ». Passionnant dans son objet, ce projet l’est plus encore par l’emboîtement associatif qu’il mobilise. Ainsi, Les mariniers de Grignon, dont fait partie Denis Godeau, ne sont qu’un maillon d’une grande chaîne associative qui regroupe 10 associations de mariniers de Loire et du Canal d’Orléans, dont l’objectif commun est de faire redécouvrir la magie des lieux, son histoire et son environnement. Un écosystème associatif dont la structure multipolaire pourraient inspirer la future Maison citoyenne…
Même configuration « constellaire » pour le projet des Jardins de la Voie Romaine, que viennent ensuite nous présenter Daniel Leroy et Timothée Huck. En effet, à la mode des « poupées russes », Les Jardins de la Voie Romaine s’imbriquent dans le réseau national des Jardins de Cocagne, qui fédère une centaine de jardins d’insertion, dans toute la France. Essentiellement dévolus au maraîchage biologique, ces « jardins » emploient au sein de leurs « ateliers » des personnes fragiles, sans activité professionnelle ou exclues. Et l’activité ne se limite pas qu’au maraîchage. Elle peut prendre des formes diverses tant qu’elle sert certains fondamentaux partagés (tels que le circuit court, le choix d’une économie de la coopération, la volonté de former des consomm’acteurs responsables…). Finalement, ces jardins s’apparentent plus à des tiers-lieux agricoles à vocation sociale, « qui permettent d’écrire collectivement un nouveau langage de partage des communs » (des mots qui font l’effet d’une caresse aux oreilles des explorateurs de Maisons citoyennes… 😉).
Ainsi, dans le nord du Loiret, les Jardins de la Voie Romaine forment une belle grappe de 5 « tiers-lieux agricoles à vocation sociale » :
Nous voici donc en chemin vers le relais des 3 écluses, guidés par Timothée, pour mieux nous projeter dans ce futur espace multidimensionnel. Et de fait, alors que les travaux d’aménagement intérieur de l’auberge s’apprêtent à commencer, on se voit déjà en train de s’attabler au café associatif, pour se désaltérer (avec modération mais avec délectation) d’une bière fraîche produite sur place, dans la micro-brasserie attenante, avant de faire notre marché à la boutique des producteurs locaux… Pour prolonger notre rêve, Timothée nous explique qu’ici même, dans ce périmètre super-inclusif, toute personne pourra trouver, avec certitude et sans condition, « un lieu bienveillant pour la reprise de confiance, la reconstruction et le rebond vers un nouvel emploi ». Il précise encore une idée fondamentale : « Grâce aux activités du lieu, des liens sociaux renforcés, des socles de solidarité créés et de l’accompagnement des personnes autour des thématiques de l’alimentation durable, notre visée est que l’économie locale nouvellement développée s’adapte aux exclus du travail. » Encore du bon grain à moudre pour tous ceux qui veulent cultiver leur part citoyenne !
Mis en appétit par ces nourritures « humanistes et solidaires », nous revenons vers le bord du canal pour nous attabler tous ensemble et partager les « nourritures terrestres » que nous avons préparées pour l’occasion. Là, en toute convivialité, entre la poire et le fromage, on apprend à se connaître, on s’interpelle, on échange nos points de vue et nos ressentis. Puis, à l’heure de la sieste, Denis Godeau nous « em-barque » (au sens littéral du terme) pour une balade digestive sur le canal, avec le soleil pour témoin ! Les sourires sont sur toutes les lèvres, et chacun savoure ce temps suspendu, avant de prendre la route de Montargis, à une trentaine de kilomètres au nord-est. Direction : La maison Feuillette !
L’étape suivante de notre épopée en Maison citoyenne du Gâtinais, nous entraîne dans les pas de Mickey Leclercq et de Stéphanie Ventre, pour visiter la Maison Feuillette, Centre national de la construction paille (CNCP). Avec ces guides de haute volée (Mickey est président du CNCP – et explorateur de Maison citoyenne à ses heures ; tandis que Stéphanie en assume la responsabilité administrative et financière), nous découvrons émerveillés cette demeure témoin de la durabilité de la construction en paille. Édifiée par l’ingénieur Émile Feuillette en 1920, la bâtisse couverte de vigne vierge est le plus ancien bâtiment construit en ossature bois et isolé avec de la paille, connu à ce jour. Restaurée en 2013-2015 par l’entremise du réseau Français de la Construction Paille (RFCP), elle voisine avec un hangar en bois désaffecté, qui attend de renaître en un plateau technique de 200m2. Mickey nous explique que bientôt, ici, on transmettra l’art de construire en paille avec une école dédiée. Un bâtiment, également en paille (ossature bois ou paille porteuse), est en projet pour héberger les salles de cours, tandis que la maison principale hébergera à terme un centre de ressources pour le grand public. Sans doute encore, pour les explorateurs des Maisons citoyennes que nous sommes, des liens futurs à imaginer et à tisser avec cette « solide maison », de bois et de paille. Dans son projet, dans son ambition vertueuse et durable, elle a de quoi nous faire rêver.
Revigorés par toutes ces découvertes, nous installons un cercle de chaises dans la cour de la propriété pour nous adonner à l’une de nos activités favorites : le tour de parole, pour que chacun·e puisse formuler son ressenti, et clore en beauté cette journée foisonnante (comme un fétu de paille). Au milieu de l’enthousiasme général, du caractère stimulant et prometteur de toutes ces initiatives concrètes en matière de transition écologique et sociale, de la passion, du dévouement et de la puissance de l’engagement bénévole, des interrogations se font jour :
Autant de questions à mûrir et à creuser pour affiner le projet de Maison citoyenne et lui donner corps, petit à petit. Pour l’heure, il est temps de se dire au-revoir et de rentrer avant la nuit. Une chose est sûre, au terme de ce qu’il convient de considérer comme une « super journée » (selon l’expression de Hubert), Jean-Christophe, lui, ressort conforté dans la conviction qu’une Maison citoyenne a toute sa place ici, et qu’elle trouverait sa légitimité au centre d’un triangle reliant transition écologique, solidarité et démocratie.
Affaire à suivre